Tous les ans, l’associations Les Nids organise un colloque pour attirer l’attention sur les enjeux de la protection de l’enfance. Cette année, c’était le 10ème. Près de 200 personnes avaient fait le déplacement ce 18 novembre pour débattre du Droit à l’enfance. Parce qu’il y a la convention internationale des Droits de l’enfant et la réalité. La réalité plurielle partout dans le monde mais aussi très nuancée ici en France, en Normandie. De quel Droit à l’enfance jouissent les enfants protégés par la loi? A quelles réalités sont-ils confrontés? Dans quelle vie peuvent-ils se projeter?
Plus d’attention, plus de moyens, plus de bénévoles, plus
Des universitaires de haute qualité – juriste, sociologue, psychologue – étaient présents pour faire part de leurs recherches et pour que les pratiques changent: Ces enfants méritent plus d’attention parce qu’ils ont à dire ce qu’ils pensent, vivent, veulent, imaginent. Ca paraît évident mais bien souvent, encore trop souvent, ce sont les adultes – emplis de bonne volonté – qui imposent leur chemin – leurs théories de loyauté, de parentalité exclusive notamment – aux parcours de celles et ceux dont ils ont la charge. J’ai beaucoup aimé le travail de Catherine Sellenet, qui vient bousculer ces théories du siècle passé. Elle a recueilli de nombreux témoignages d’enfants protégés, entendez ici placés hors de leur famille « naturelle ». Elle a ainsi pu identifier des tendances, des profils, des attentes, des enjeux différents. Il y a ceux pour qui ça va: les affiliés, les ancrés, et ceux qui sont les plus fragiles: les écartelés, les apatrides. Ils n’arrivent pas à trouver leur place, écartelés entre deux familles (mais qu’est-ce donc qu’une famille pour eux?) ou pire, ils ne se sentent bien nulle part. Les résultats de cette recherche passionnante seront publiés dans un ouvrage au mois d’avril 2017.
Il faut aussi plus de moyens afin de pouvoir individualiser l’accompagnement, être au plus près de leurs besoins, leur assurer la stabilité dont ils ont besoin. Les associations sont toutes logées à la même enseigne: baisse des subventions. Mais s’il n’y avait qu’elles… Parce que les administrations aussi voient leur budget fondre… Tiens, et les collectivités également!
Plus de bénévoles dans le tissu associatif du Droit à l’enfance: c’était l’un des messages de l’association Horizon parrainage. Située à Lyon, elle a actuellement 50 enfants qui attendent un parrain, une marraine, une personne avec qui partager une passion, avec qui voir autre chose, avec qui parler de tout et de rien, avec qui se construire une relation désintéressée, bénévole, pérenne et joyeuse.
Coopérer et faire mieux
En matière de protection de l’enfance, il faut aussi – encore, toujours – inciter à coopérer. Sur le papier, les évidences les plus (faussement) banales sont sur le terrain bien complexes à mettre en œuvre: collectivités et associations, experts et bénévoles, universitaires et universitaires, parents et institutions.
« Pour accompagner l’enfant, c’est tout son écosystème familial, géographique, amical qu’il faut pouvoir mobiliser. Il faut prendre en compte tout son quotidien. »
Philippe FABRY, formateur de l’Institut Régional de Travail Social de Paris Ile de France
Philippe Fabry est aller voir ailleurs: Belgique, Royaume-Uni, Québec, Suisse. Cette analyse lui a permis de repérer les singularités, nombreuses, du système français. Un seul exemple: la France a fait le choix de salarier les familles d’accueil, alors que presque partout ailleurs, les familles sont bénévoles, défrayées. Détail? Non, bien au contraire. Que répondre à l’enfant qui considère que cette famille n’est pas là pour lui mais pour l’argent. C’est sans doute faux, les familles d’accueil sont militantes de la protection de l’enfance. Mais c’est un peu vrai aussi. Comment va-t-il pouvoir alors s’attacher quand entre eux interfère à ses yeux une liasse de billets?
Faire mieux, c’est aussi simplifier. Ha… La France, son arsenal juridique, sa profusion de normes, d’organismes aux compétences qui se chevauchent. Simplifier donc. Au service des enfants. Tout le monde est d’accord. En attendant, il faudra un colloque en 2017. Les intervenants, le public étaient d’accord: il y a encore tant à faire.
J’étais présente en tant que modératrice. Comme à chaque fois, le travail préparatoire était passionnant, avec ce petit supplément d’âme ou d’émotions: il s’agissait ici de me plonger dans un sujet encore plus sensible lorsqu’on est devenu parent.
Le colloque était filmé, il devrait être possible prochainement de retrouver les contenus des échanges.