st-ce que la lecture d’une BD vous a déjà profondément marquée?
Je suis très loin d’être une spécialiste de cette littérature, comme de tout autre littérature d’ailleurs… Mais parfois, on tombe sur un trait de crayon, des mots, un sens qui interpelle, qui questionne le monde.
La Frontière Invisible est de celles-ci…
Cette BD en deux tomes a déjà 8 ans. Ses papas sont François Schuiten et Benoît Peeters. Elle a vu le jour à la maternité Casterman, sous le signe des Cités Osbcures.
Cette BD met magnifiquement en mots et en images l’instrumentalisation de la géographie par le politique. L’espace n’est plus. Il sert. Il est soumis à la conquête, à la revendication. Il n’existe plus pour lui-même. Il n’est plus q’un instrument. Un objet au service de.
Finalement, cette BD ne dit rien de plus que ce qui est. L’espace, les lieux, aussi lointain soient-ils, sont soumis au politique, à l’idéologie, deviennent des étendards, des drapeaux, donc alimentent l’affrontement, produisent un conquérant et un asservi.
Les frontières peuvent sembler invisibles et pourtant on interdit peut-être encore plus de les franchir. Je pense aux nations européennes qui, fières de la libre circulation, s’empressent d’expulser leurs propres citoyens (les Roms…) ou de choisir ceux qui viennent de plus loin (prouve-moi que tu peux m’apporter quelque chose que je n’ai pas et je t’ouvre ma porte).
Les frontières peuvent être érigées en mur. Mais de quel côté est-on enfermé? Dans un espace? Dans un dogme?
Notre monde est fait de frontières (belle porte ouverte que j’enfonce avec vigueur!!). Entre l’espace public et l’espace privé, entre le politique et le non-politique, le tendance et le ringard, entre moi et l’autre. Parfois poreuses, parfois impénétrables. Notre monde est construit sur des frontières. Mais ces frontières ne doivent pas devenir le monde. C’est l’échange, d’un côté à l’autre, qui produit la vie. Pourtant, tant d’exemples de frontières qui ne sont plus des espaces de liens mais de ruptures… entre les Etas-Unis d’Amérique et le Mexique, entre l’Etat d’Israël et la bande de Gaza, entre les banlieues et les villes-centre, entre le vrai et le faux, …
Je crois qu’on a besoin de l’idée de frontière, pour concevoir l’altérité mais la frontière a vocation a être déconstruite dès qu’elle est comprise et non soulignée, affichée. Elle doit nourrir la nuance.
Enfin,vous me direz, une fois que j’ai dit tout ça, je n’est rien dit… euh écrit.
Je constate simplement. Mais le constat est peut-être le premier état de la réflexion, de l’idée?
Je pense, en-dedans de moi, mais dans l’instant qui suit, je passe une frontière pour soumettre ce petit bout de pensée dans l’espace qu’est Internet. Y’a-t-il des frontières dans l’espace du WeB?