Lundi, hier, j’organisais une rencontre avec l’Office National des Forêts (l’ONF). En fait non, ma stagiaire a organisé cette rencontre. Après quelques présentations, le temps des échanges était venu. J’ai posé une question toute simple: comment l’ONF adapte l’exploitation des forêts domaniales au changement climatique? Ce fût alors à mes yeux le moment le plus passionnant de la soirée… Et j’avais envie de le partager avec vous, en revenant rapidement sur quelques points évoqués alors… Cela vous donnera peut-être envie d’y aller voir de plus près.
Les forestiers font partie des premiers à s’être intéressés à la question de l’évolution du climat. Parce que lorsque l’on plante un arbre, on se projette 100 ans, voire 150 ans dans l’avenir. Alors oui, les choses changent dès maintenant. Des projections montrent que les espèces devront être plantées plus au Nord. Le hêtre par exemple, très courant en Haute-Normandie, pourrait remonter de 400km pour trouver un climat adapté à ses besoins. Alors forcément, comme moi, vous vous demandez ce que vont devenir nos belles hétraies! Et bien aujourd’hui, lorsqu’une parcelle de hêtres est exploitée et doit être replantée, pour un tiers, le hêtre est remplacé par du chêne sessile.
Haaa la Normandie, sa pluie douce et fraîche qui lèche le visage, caresse le dos, ruisselle sous les pieds… Et bien le changement climatique c’est aussi par endroit plus de pluies. Alors dans les forêts, notamment nos forêts normandes arrosées des cieux, il faut trouver des solutions d’exploitation où le matériel va moins tasser les sols car l’équation est la suivante: pluie + exploitation avec du gros matériel = hausse du risque de tassement des sols = acidification plus rapide du sol = perte de biodiversité.
Le changement climatique, c’est également des phénomènes extrêmes peut-être plus fréquents. A l’ONF, ici, on se souvient bien de la tempête de 1999, qui a mis à terre plus de 10% des arbres domaniaux. Un travail étroit a été mené avec des universitaires. Cela a permis d’identifier une hauteur critique d’arbre. Au-delà de 23m, le risque augmente… Il faut donc repenser l’exploitation des parcelles. Je reviens à nos hêtrais. Le cycle d’exploitation du hêtre tourne – enfin tournait – autour de 130-150 ans. Afin de s’adapter à ce nouveau risque tempête, le hêtre est désormais exploité sur un cycle d’un siècle, pas plus, et sa croissance est contrainte pour qu’il grossisse plus qu’il ne croît.
Bref, les forêts sont en train de changer, sous nos yeux de 2013, pour que dans 100 ans les arbres ne meurent pas avec nous, les pieds acides, l’écorce asséchée, les feuilles grises. Le changement climatique, cela fait donc bien longtemps que c’est bien plus que des rapports du GIEC qui s’empilent au fil des décennies. Les réfugiés climatiques, les espèces qui disparaissent dans le silence, tout ça c’est un peu loin de nous, alors abstrait, malheureusement.
Mais cette semaine, ou bien dimanche, allez faire une balade en forêt, regardez autour de vous. Tout est en train de changer, maintenant!
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Pour en savoir plus, vous pouvez aller piocher de nombreuses infos sur le site du réseau AFORCE, réseau mixte technologique, consacré à l’adaptation des forêts au changement climatique.
Tres bonne lecture, je vous en remercie !!!